La chapelle de Kernivinen



Situé sur la commune de Perros Guirec, tout près du pont des quatre recteurs, il est un lieu-dit : Kernivinen, Ker an Nivinen, en breton : le hameau des ifs. Bien que la planta- tion de ces conifères soit antérieure à l’introduction du christianisme, il se pourrait que les églises fussent fréquemment bâties dans les bosquets d’ifs ou tout près des vieux ifs, symbole religieux de l’immortalité. Ce hameau de Kernivinen abrite donc la chapelle de Notre Dame de Pitié. Celle-ci construite au 14ème siècle est la seconde, car déjà en ces lieux, une précédente chapelle dédiée à Saint-Marc l’évangéliste a été édifiée à la fin du 12ème siècle. Elle a entièrement disparue. On va voir ci-après que notre commune de Saint-Quay-Perros n’est pas étrangère à la réalisation de cette chapelle existante.


Une légende est liée à la construction de la Chapelle Notre-Dame de Pitié de Kernivinen : "Autrefois, une petite fille infirme gardait un troupeau de moutons à l’endroit où se trouve l’édifice. Cette enfant en s’amusant et en fouillant la terre, trouva le buste d’une Vierge, lequel était en plâtre. Une complainte fut composée et fait connaître que la petite fille fut complètement guérie par le seul attouchement de ce buste. A la vue du miracle, les communes de Perros Guirec, Pleumeur-Bodou, Saint-Quay et Servel se cotisèrent pour faire bâtir la chapelle et le Comte de Farcy, de Servel, qui était propriétaire du terrain, y contribua pour une forte somme".


Laissée à la ruine du temps, la chapelle fut entièrement reconstruite au début du 18ème siècle, par le Marquis de la Chastre, Comte de Nançay, prééminencier de la chapelle et de son épouse Isabelle de Jouvenel de Harville des Ursins dont on trouve le blason à l’intérieur. Le porche sud, celui de l’entrée principale est un réemploi de la chapelle antérieure ; il est de style Renaissance. Le pignon date de 1722. Sur le clocher, on peut lire la date de la fin de la construction-restauration 1758 et le nom du ministre du culte d’alors : Quemper Yves, gouverneur de la chapelle en poste à cette date. Agrandissement en 1772 : Par décision du conseil de fabrique, une petite aile est élevée à gauche du chœur, reliée au reste de l’édifice par une arcade en pierres taillées sur laquelle on peut lire "ARCADE : BATIES * : PAR :LE SOINS * : DE : GREGOIRE : TALOVARN : GOV (R) [Nota : * Ne pas y voir de faute : Transcrit intégralement tel.].


En 1792, en pleine révolution, la chapelle est interdite. En 1817, elle est prise en charge par les voisins, voir la pierre gravée au dessus de la porte d’entrée, au niveau de la panne sablière, en dessous de la toiture. A savoir et important, cette chapelle est de nos jours, toujours entretenue par les voisins et son comité de quartier. La cloche actuelle a été fondue en 1827 à Lannion par Jamtel et réparée en avril 1996 par Alice et Yves Guelou. Lors de la réparation a été découvert le nom du parrain : Laurent Millet, Curé de Perros Guirec, de la marraine : Mme Simone Neuel, dame Le Bozec, et le nom du trésorier : Jean Le Morvan.


Mobilier : il y avait un hôtel en bois peint (blanc, bleu et or, aux couleurs du Marquis de la Chastre), des statues anciennes de la Vierge, de sainte-Anne, saint-Marc, Saint-Sébastien, Saint-Roch et un tableau peint vers 1800 représentant un Saint-Yves entre le riche (habillé en style directoire) et le pauvre. Malheureusement en 1972, la chapelle a été de nouveau cambriolée, pillée et il ne resta que les statues de notre Dame de Pitié et de Saint-Sébastien ainsi que le tableau. Ce dernier est en sureté et ne revient à la chapelle que pour le pardon annuel. Un hôtel en granit a été construit en remplacement.


On peut voir à l’intérieur deux autres statues récentes : face à la porte - Sainte-Anne apprenant à lire à Marie - et dans l’aile – Saint-Joachim l’époux de Sainte-Anne. Ces deux statues ont été offertes par la famille Quéré du comité de quartier. Les vitraux protégés par une structure en inox sont récents ainsi que le faux vitrail peint à l’intérieur. En dessous on peut voir un blason qui pourrait être celui du Marquis rénovateur. Au niveau religieux proprement dit, tous les ans, le troisième dimanche après Pâques, a lieu un pardon avec procession jusqu’à la butte de Ker An Nivinen. L’après midi,une fête profane est organisée par le comité de quartier, les bénéfices servant à l’entretien de la chapelle. Tous les mardis soirs du mois de mai les "Voisins" reçoivent les fidèles pour le "Chapelet". Des vestiges dans des endroits magiques, dont je ne cesse de me lasser ! Des vieilles pierres, certes, mais ne sont-elles pas là, les témoins de notre passé ? Personnellement, j’apprécie aussi la beauté et la finesse des deux nouvelles statues.


Sources : Flohic-Editions, département 22 ; Arssat de Lannion(dont Claude Berger et Jean-Jacques Lartigue); le légendaire dela Bretagne de Henri Weitzmann ; la paroisse de Perros Guirec (dont Jean-Claude Petit) pour les écrits rédigés et affichés. Les voisins, aussi et notamment la famille Le Jaouen, ainsi que le comité de quartier.



Un grand merci à Claude-Henri Mattenet qui est l'auteur de cet historique de la chapelle de Kernivinen